Dotâr, un instrument de musique traditionnel iranien

L’élément appartient à la musique traditionnelle iranienne. Il est fabriqué et pratiqué depuis des siècles dans la partie nord-est de l’Iran et dans les pays voisins. Il se concentre essentiellement dans cette zone géographique, qui inclut les régions suivantes d’Iran :

1) La province du Khorasan septentrional : Ghouchan, Shiravān, Bojnūrd, Darreh Gaz, Esfarayen, Āshkhā ;

2) La province du Khorasan-e Razavi : Torbat-e Jam, Tāyābād, Bākharz, Khwaf, Kāshmar

3) La province du Khorasan méridional : Birjand

4) La province du Golestan : Turkaman Sahrā Bandar-e Turkaman, Gonbad, Gorgān, Morāveh Tepe Tepe, Katūl Destrict

5) La province du Mazandaran : Sari, Behshahr

Il est traditionnellement fabriqué dans de petits et grands ateliers, la plupart du temps dans des foyers ruraux et urbains. En plus de fabriquer l’instrument, certains des artisans en jouent et forment les jeunes générations. Comme il est fabriqué et pratiqué dans diverses régions, il existe des dotârs avec différentes tailles, formes de caisse, nombres de frettes, longueurs de manche, décorations et techniques de jeu selon les régions.

L’élément est reconnu comme l’un des principaux éléments de l’identité culturelle et sociale des régions dans lesquelles il est fabriqué et pratiqué. Les détenteurs et les praticiens sont essentiellement des agriculteurs, les hommes étant artisans et musiciens et les femmes musiciennes. Depuis une époque récente, on observe la présence parmi eux de jeunes chercheurs, sans distinction de genre. Les connaissances traditionnelles de sa fabrication et de sa pratique sont transmises de façon informelle, de génération en génération, selon la méthode du maître à l’élève. Cet élément apparaît au niveau local dans la littérature orale et écrite, notamment dans les poèmes, proverbes, chants et berceuses, et renvoie à la nature, à l’histoire et aux origines des détenteurs. Comme cet élément est partagé par plusieurs communautés, groupes et individus, il promeut le respect mutuel et la compréhension parmi les communautés concernées. 

Le dotâr est un instrument de musique traditionnel à cordes pincées qui est joué lors d’événements et dans des lieux à vocation socioculturelle tels que les mariages, les fêtes, célébrations, les cérémonies rituelles, etc. Le dotâr présente une caisse en forme de poire faite en bois séché de mûrier. Son manche est fabriqué dans du bois d’abricotier ou de châtaignier. Il est doté de deux cordes traditionnellement en soie, mais remplacées aujourd’hui par des cordes métalliques. D’après certaines croyances, l’une des cordes est mâle et sert d’accord tandis que l’autre est femelle et est utilisée pour jouer la mélodie principale.

Les artisans respectent la nature car ils utilisent du bois mort séché pour fabriquer le dotâr.

Il n’est pas contraire aux instruments nationaux et internationaux tels que la Déclaration universelle des droits de l’homme, il est compatible avec un développement durable, etc.

Les joueurs de dotâr, ainsi que les artisans et les formateurs, sont les principaux détenteurs et praticiens de l’élément. Ils bénéficient également d’un statut social supérieur. On appelle « Dotārīs » les plus éminents joueurs de dotâr, dans l’est des provinces du Khorazan-e Razavi et du Mazandaran, qui racontent des histoires en jouant. Ils ont reçu un enseignement traditionnel/informel de génération en génération et enseignent maintenant l’élément à leurs élèves. Les artisans sont presque exclusivement des hommes, mais il n’existe aucune limite d’âge et de genre chez les joueurs de dotâr. Certains des artisans jouent et forment leurs apprentis. C’est le cas par exemple du maître Hossein Daman-Pak qui fabrique des dotârs dans son atelier privé, où il forme également ses étudiants.

Comme on l’a dit plus haut, ils occupent un rang social élevé car ils transmettent leurs valeurs religieuses, historiques, littéraires et morales à travers leurs récits. De plus, lorsqu’un problème survient dans leur communauté ou leur groupe ethnique, ils sont appelés pour régler le différend. Les Bakhshis sont l’équivalent des Dotaris pour la partie septentrionale du Khorasan et du Torkaman Sahra.

Les Bakhshis et les Dotaris ont été et sont invités à des festivals de musique au niveau provincial, régional, national et international où ils sont les représentants des régions concernées par le dotâr dans la partie nord-est de l’Iran. Enfin, la responsabilité la plus importante des détenteurs est la transmission d’une partie de leur identité culturelle à travers cet élément.

Les connaissances traditionnelles liées à la fabrication et à la pratique du dotâr ont toujours été transmises de façon informelle, par la méthode du maître à l’élève. Au terme de plusieurs années de formation, cette méthode permet d’enseigner la musique ainsi que les normes et mérites culturels et sociaux de la région. À titre d’exemple, tous les Bakhshis et les Dotaris vivant dans les régions concernées par le dotâr ont appris à jouer et à raconter des récits auprès de leur père, d’un oncle ou d’autres membres plus âgés de leur famille. Il peut néanmoins arriver également que plusieurs élèves soient extérieurs au cercle familial. Il convient d’ajouter que, pour parfaire leur maîtrise, les élèves continuent leur formation devant d’autres maîtres de la région. Par ailleurs, la transmission informelle s’applique aux connaissances traditionnelles de l’artisanat. Elle a lieu la plupart du temps dans de petits ateliers privés.

De nos jours, en plus de la transmission informelle en zone rurale, plusieurs cours et établissements ont vu le jour dans les villes à l’initiative des pouvoirs publics ou du secteur privé. Il faut souligner que la transmission informelle est la méthode la plus répandue, même dans les cours en zone urbaine où les garçons et les filles apprennent à jouer du dotâr ensemble. Pendant la formation, un élève ne peut pas commencer une nouvelle mélodie tant qu’il n’a pas réussi à apprendre la première. Bien que les élèves des cours en milieu urbain ne soient généralement pas des membres de la famille ou des proches des maîtres, ils font de leur mieux pour apprécier les mérites culturels, historiques, sociaux et éthiques de la pratique et de la fabrication du dotâr.

Partout, le dotâr sert à animer des fêtes joyeuses, des mariages, des réunions de famille et des soirées entre amis, ainsi que des rituels gnostiques. Le dotâr sait exprimer l’identité ethnique et locale du lieu où il est pratiqué. Ses sonorités ont un effet apaisant pour le public et sont de nature à révéler la joie cachée dans la culture traditionnelle du lieu en question. Quand ils jouent, les musiciens racontent des récits épiques, historiques, lyriques, moraux et gnostiques qui constituent l’histoire, la fierté et l’identité de leur ethnie. Par conséquent, cela contribue également à préserver non seulement l’élément mais aussi une part de leur identité. Du fait que le public est attiré par la musique de son pays natal, les musiciens ont toujours été invités à toutes les célébrations et fêtes privées et familiales.

Du fait des évolutions de la société, on assiste également à certaines transformations de l’élément. Par exemple, bien que le dotâr soit généralement joué en solo, on voit aujourd’hui des groupes de musiciens se former ou un joueur de dotâr rejoindre un groupe de joueurs d’autres instruments de musique traditionnels. En plus d’être positive, cette forme de musique en groupe stimule la survie et la pérennité de l’élément, notamment auprès du jeune public.

Ces dernières décennies, on joue du dotâr dans les festivals de musique locaux, régionaux, nationaux et internationaux. Il est intéressant de noter que les joueurs de dotâr, lorsqu’ils viennent aux festivals, accompagnés de leurs enfants - garçons ou filles - portent un costume ethnique ou local. Ce faisant, ils présentent au public un aspect de leur identité ethnique ou locale ainsi qu’un élément de leur patrimoine culturel immatériel qui lui est parfois inconnu.

La Source: fr.UNESCO

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